Gestion des signalements de harcèlement : recommandations clés du défenseur des droits en 2025

Le 5 février 2025, le Défenseur des droits a publié une décision-cadre n°2025-019, qui propose des recommandations essentielles pour les employeurs publics et privés concernant la gestion des signalements de discrimination et de harcèlement sexuel au travail. Cette décision fait suite à une série de réclamations formulées par des salariés et des agents publics qui ont exprimé des difficultés dans la mise en place d’enquêtes internes après de tels signalements.

Le Défenseur des droits a ainsi pris l’initiative de créer un cadre méthodologique précis visant à garantir des enquêtes non seulement équitables, mais également transparentes et efficaces. L’objectif de cette décision est de renforcer la rigueur des procédures en matière de lutte contre la discrimination et le harcèlement, tout en proposant des solutions concrètes aux faiblesses observées dans le système existant.

La problématique soulevée par cette décision-cadre repose sur la persistance de pratiques inégales dans le traitement des signalements de discrimination, de harcèlement moral et sexuel au sein des organisations. En dépit des dispositifs législatifs mis en place, tels que la loi n° 2012-954 du 6 août 2012 sur la lutte contre le harcèlement moral et sexuel, des lacunes demeurent dans la gestion des enquêtes internes par les employeurs.

Quels sont les motifs de signalement portés à l’attention du Défenseur des droits ?

Parmi les réclamations soumises au Défenseur des droits, les difficultés les plus fréquemment signalées sont :

  • Un manque de ressources suffisantes ou de compétences spécifiques pour mener à bien un processus complexe, ce qui conduit à des conclusions parfois bâclées ou mal conduites.

  • Ce manque de standardisation empêche une évaluation objective et rigoureuse des faits.

  • Un manque de protection des victimes de harcèlement dans l’entreprise, ayant pour conséquence que ces dernières subissent des sanctions indirectes (représailles, isolement, stigmatisation). Il ressort que les victimes présumées ou avérées se retrouvent dans une position extrêmement vulnérable.

Après l’établissement du cadre, quels sont les prérequis pour mener une enquête interne ?

L’employeur doit veiller à l’application des principes suivants :

  • La confidentialité pour assurer la dignité et la vie privée de chacun,

  • Le principe d’objectivité,

  • Le principe d’impartialité vis-à-vis des parties,

  • Le principe de neutralité vis-à-vis du respect de la procédure d’enquête interne fixée dans l’entreprise,

  • L’indépendance dans l’audition des protagonistes et le processus.

Voici deux récents cas :

AP-HP en octobre 2024 :
L'AP-HP a validé une charte de bonne conduite pour les professionnels des blocs opératoires afin de lutter contre le harcèlement moral et les violences sexuelles. Ce texte, porté par une professeure en médecine, engage les travailleurs à adopter des comportements respectueux et bienveillants. Cette initiative fait suite à de nombreux témoignages d'humiliations et de comportements inappropriés dans ces environnements de travail.

Air France en février 2025 :
Suite à des révélations sur Radio France concernant des violences sexuelles et sexistes au sein d’Air France, la directrice générale de la compagnie a annoncé de nouvelles mesures pour renforcer la lutte contre ces agissements. Un dispositif de prévention sera intensifié, avec une formation accrue pour le personnel et la création d’une cellule d’écoute indépendante.

Le Défenseur des droits conseille aux employeurs de définir clairement la méthodologie de l'enquête interne et de la formaliser après consultation des instances représentatives du personnel (CSE). Il suggère que chaque étape de l'enquête soit documentée par écrit.

Il est essentiel que l'enquête interne reste strictement confidentielle. Pour ce faire, il est indispensable de restituer les conclusions de l'enquête et ses modalités lors d'une séance du CSE. Ainsi, elle fera l'objet d'un procès-verbal, garantissant ainsi la transparence et la traçabilité de la procédure pour une documentation utile. En effet, cela permet de garantir une vérification a posteriori par la direction, l'administration ou les autorités compétentes, telles que les juges, l'inspection du travail ou le Défenseur des droits.

Qui sont les enquêteurs ?

L'employeur choisit qui mène l'enquête, soit en interne, soit via un cabinet de conseil, en collaboration avec les élus CSE en charge de la santé, de la santé et des conditions de travail. Les administrations publiques peuvent également déclencher une enquête. Si un tiers à l’entreprise est impliqué, comme un client ou un fournisseur, une enquête conjointe peut être réalisée. Pour un agent public dans un organisme privé, l'enquête peut être externe ou conjointe, mais l'administration ne peut pas auditionner les salariés privés.

Quelles sont les sanctions possibles dans le cas de harcèlement avéré ?

Des sanctions et des mesures correctives doivent être mises en place pour prévenir toute répétition des faits. Ces mesures vont de l'avertissement au licenciement pour faute grave, en fonction de la gravité des faits.

En cas de sanctions pénales, l’auteur des faits encourt une peine de prison d’un an ainsi qu’une amende de 3 750 € (Article L. 1152-2, L. 1153-2 et L. 1153-3 du Code pénal).

Conclusion

En conclusion, la décision-cadre 2025-019 recommande des pratiques renforcées pour garantir des enquêtes internes transparentes et efficaces sur la discrimination et le harcèlement sexuel au travail. Elle insiste sur la protection des victimes et sur des sanctions adaptées en cas de faits avérés.

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