Gestion des oeuvres sociales : comment les élus CSE peuvent lutter contre la fraude aux justificatifs?
La gestion des ASC représente un point d’attention majeur pour les élus CSE et plus particulièrement le binôme trésorier/secrétaire. Face aux tentatives de fraude aux justificatifs, qui peuvent déstabiliser le budget des activités sociales et culturelles, les élus doivent s’appuyer sur un triptyque “prévention, réaction, correction” du fait de leur pouvoir de contrôle exprimé dans l’article L 2312-78 du code du travail. Le but est de préserver les acquis des avantages salariés.
Prévention : comment encadrer effectivement l’accès aux activités proposées par le CSE ?
Les élus CSE doivent établir des règles claires dans leur règlement intérieur pour éviter les contentieux et sécuriser la gestion des ASC. Sans cadrage préalable, les salariés peuvent réclamer l'intégralité des prestations sans limite de durée. Le CSE propose une série d'activités délimitées par l' article R 2312-35 du code du travail permises par l’article R2312-35 du Code du travail. Il appartient au CSE de communiquer largement auprès de tous les salariés les conditions d’accès appliquées.
Le célèbre arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, n°22-16.812 du 3 avril 2024, impose aux CSE de revoir leur copie sur les critères d’ancienneté et de présence effective. En effet, ces critères sont constitutifs d’une dicrimnination. Autrement dit, la Cour a jugé qu’aucune condition d’ancienneté ne peut être imposée aux salariés pour bénéficier des activités sociales et culturelles. L’URSSAF exige des critères objectifs pour l’attribution des œuvres sociales. Afin d’agir en toute conformité, le guide de l’URSSAF CSE présente les règles applicables. Les CSE ont jusqu’au 31 décembre 2025 pour supprimer la condition d’ancienneté et de présence effective.
A noter que le CSE peut refuser d’octroyer les œuvres sociales si les conditions ne sont pas remplies, les critères de modulation ne doivent pas être discriminatoires et doivent être objectifs et pertinents. A défaut, le salarié pourra contester auprès du juge pour obtenir réparation par le versement d’ indemnités.
Proposition d’action pour une gestion efficace des ASC :
Communiquer clairement auprès des salariés sur les critères objectifs de modulations retenues et de renouveler la communication sur une période donnée,
Définir les justificatifs acceptés pour chaque prestation,
Fixer un mode et un délai de remises,
Choix de prestataires fiables du CSE avec une sélection rigoureuse,
Réalisation d’audit de manière ponctuelle ou régulière.
Détection : comment organiser un contrôle efficace des justificatifs
Le CSE collecte des informations qui peuvent parfois être biaisées afin d’obtenir une prestation : fausses déclarations ou justificatifs falsifiés. Il est important de vérifier les justificatifs en appliquant un principe de regroupement des informations. A titre d’exemple, le CSE peut demander des éléments aux salariés, et, en parallèle solliciter les informations auprès de l’employeur. La vérification permet de préserver l'équité dans la gestion des ASC.
Selon une jurisprudence constante, et notamment l'arrêt de la Cour d'appel d'Aix-en-Provence du 20 mars 2025 (n° 23/15905), le CSE doit pouvoir justifier toute attribution d'ASC. Cette obligation de justification s'impose aux élus CSE pour deux raisons : assurer la transparence envers les salariés bénéficiaires et répondre aux exigences des organismes de contrôle.
Proposition d’action pour vérifier les justificatifs :
Contrôler de cohérence des justificatifs,
Constituer un dossier de preuves à partir des informations demandées,
Mettre en place d’une procédure de récupération des sommes indues.
Sanction : comment agir efficacement dans le respect du cadre légale du CSE ?
Même si dépourvus de pouvoir disciplinaire, les élus CSE disposent de recours limités mais efficaces pour sanctionner les fraudes dans la gestion des ASC. L'objectif est de garantir l'intérêt collectif des salariés tout en préservant l'équité et la viabilité financière du CSE.
La loi permet au comité social-économique et environnemental de réclamer le remboursement des prestations versées indûment, en cas de mauvaise foi du bénéficiaire (restitution de l’indu article 1302-1 Code Civil). En outre, l'article 441-6 du Code pénal réprime la fourniture de fausses déclarations en vue d'obtenir un avantage indu, ouvrant la voie à une action en justice, ou la fourniture de fausses déclarations en vu d’obtenir un avantage indu est passible de poursuites pénales (article 441-6 du Code pénal). De même, le détournement de fonds dans les CSE est un délit pénal puni par l’article 314-1 du code pénal, et peut aussi faire l’objet de sanctions civiles.
Proposition d’action :
Informer préalable qu’une demande de remboursement des sommes dûes pourra être exigées,
Appliquer le montant minimal en cas de modulation,
Actualiser le dossier de preuve pour étayer l’action en justice.
Conclusion : une gestion rigoureuse des oeuvres sociales de l’entreprise
Une gestion des ASC rigoureuse protège le CSE tout en respectant les droits des salariés. Les élus CSE doivent adopter une approche équilibrée entre bienveillance et contrôle pour préserver l'équité et la viabilité financière du comité. L’art de vivre des ASC est de documenter et communiquer sur les décisions prises.

